Histoires de marques : #3 Milka

Signe de la démocratisation d'un produit longtemps vendu en pharmacies et réservé aux élites, la réclame met en scène des enfants, le regard illuminé par la gourmandise. Milka se distingue par la couleur mauve de l'emballage et par la présence d'un fermier et de sa vache sur fond de paysage alpin. C'est peut-être pour illustrer ces bienfaits, qu'un Saint-Bernard, nommé Barry, devient le symbole de la marque, en 1930. Il sera de tous les supports publicitaires (cendriers, buvards, porte-clés...) jusqu'à la fin des années soixante.

Le destin de la marque bascule en 1971, quand l'agence Advico Young & Rubicam suggère d'utiliser une vache vivante de la même couleur que l'emballage des chocolats. Race retenue : la Simmental. Un choix motivé par les caractéristiques physiques de ces bêtes. Symbolisant la tendresse, l’humour et la crédibilité, une telle création s’inspirait directement du dicton : « Familiarisez-vous avec ce qui est étranger, devenez étranger à ce qui est familier. »

Et que la Société protectrice des animaux se rassure, la couleur lilas est obtenue avec un vaporisateur pour les cheveux, contrôlé par l'Institut vétérinaire de l'université de Zurich et qui disparaît quand on brosse l'animal !

Plusieurs vaches vont tenir le rôle titre, mais on retiendra l'exploit de Schwalbe (Hirondelle), de la région de la Lenk, qui tournera six films télé de 1986 à 1991. On raconte que cette vache, ne produisant plus assez de lait, devait être conduite à l'abattoir. Devant la réaction des consommateurs, Jacobs Suchard (société créée en 1982 à la suite de l'achat de Suchard par les Cafés Jacobs) s’engagea à verser une pension au propriétaire de la vache pour lui assurer une bonne retraite !

En 1987, Milka devint une marque à part entière. Si le nom Suchard disparaît de l’emballage, la couleur mauve (déposée) est maintenue. La typographie ne change pas, exprimant par sa couleur blanche, le lait du pays des Alpes, par son écriture manuscrite le monde de l'enfance, et par sa rondeur la tendresse maternelle.

Après le thème de la tentation (1984) « Milka, la plus tendre des tentations depuis que le chocolat est né », l'agence Young & Rubicam développe en 1991 celui de la tendresse : « Ça commence par M. et ça veut dire tendresse. Milka, le chocolat au bon lait des Alpes. Milka, la tendresse avec un grand M ». En 1994, la vache devient le personnage central de la communication dans les films intitulés la Cure et la Gymnastique, réalisés par Stéphane Clavier (le frère de l'acteur). Avec un film de 1998, Milka enrichit son bestiaire d'une marmotte qui, selon un randonneur, à la réplique devenue culte « met le chocolat dans le papier alu ». Le film est réalisé par l’australien, Chris Noonan qui fut par la suite aux commandes des films « Babe » et « Miss Potter ».

https://www.youtube.com/watch?v=l3RTd7UwWCc

Par Jean Watin-Augouard – « Histoires de marques » aux éditions Eyrolles - Préface de Marcel Botton - www.trademark-ride.com

En 2001, la marque estimant subir un préjudice économique et d’image dû au cyber squattage d’une couturière de la Drôme, Madame Milka Budimir, dépositaire du site milka.fr, demandera justice devant les tribunaux français. La cour, considérant que la marque Milka existait bien avant la naissance de Madame Milka Budimir, estima, en l’espèce, que le droit des marques prévalait sur le droit des personnes. La couturière de la Drôme dut transférer son site au géant américain Kraft Foods, propriétaire de la marque lilas.

Aujourd’hui, avec plus de cent-dix spots publicitaires à son actif, la marque de la célèbre Simmentale continue d’être l’un des premiers vendeurs de chocolat avec plus d’un milliard de tablettes vendues dans le monde et 27% de parts de marché en France. Cette réussite lui permet d’être depuis une décennie l’un des grands sponsors du paysage alpin, notamment avec les éditions annuelles des pistes mauves dans les stations de ski. La marque mauve peut encore voir la vie en rose !